Une amitié fraternelle

2016-02-09 23:52
中国与非洲(法文版) 2016年2期



Une amitié fraternelle

Il existe une relation unique dans la société chinoise : l’amitié fraternelle. C’est une relation intime et un prolongement du concept confucéen de fraternité dans la conduite sociale. L’amitié diffère des liens du sang. Les personnes de différent statut social, origine culturelle et âge peuvent être des amis intimes et traverser des épreuves ensemble, comme des frères. Un proverbe chinois confirme l’importance de cette relation « À la maison on se repose sur nos proches, à l’extérieur sur nos amis ». Cela signifie qu’en grandissant et gagnant notre vie, les amis aideront beaucoup.

Les Chinois pensent que les frères sont comme les pieds et les mains. Ainsi, ils n’appellent pas uniquement leurs amis « frère » mais les traitent comme leurs propres frères. L’éthique chinoise se base sur les concepts de loyauté, piété filiale, devoir fraternel, mérite et vertu. Le devoir fraternel fait référence à l’amour éternel entre frères. Dans le cœur des Chinois, l’amour fraternel n’a d’égal que l’amour pour la patrie et la piété filiale vis-à-vis des parents. Il s’agit là d’une partie essentielle de l’éthique chinoise.

La société chinoise valorise les relations humaines et les relations familiales priment toujours face aux autres relations. Quand un parent avec son enfant croise un collègue ou un voisin, il demande souvent à l’enfant de le saluer en l’appelant « oncle/tante » ou « grand-père/grand-mère ». Quand les enfants vont jouer avec leurs amis, on leur demandera de les traiter comme des « frères et sœurs ». En comparaison avec l’égoïsme occidental, l’ego des Chinois prend une dimension plus collective. L’identification de ces relations accentue leur compréhension des relations interpersonnelles. Ils ajustent ensuite les critères pour construire des relations avec les autres en accord avec leurs objectifs et besoins. Il peut s’agir de famille proche, de voisins ou de collègues. En élargissant son cercle de proches, on peut profiter des ressources des personnes qui ne font pas partie de notre famille.

Les confucianistes affirment que l’on doit se reposer sur les autres pour réussir. Selon Du Weiming, spécialiste du confucianisme, le concept confucéen de développement personnel admet que la volonté humaine est fragile et que les humains commettent des erreurs. Une personne sans expérience peut difficilement réussir seule, elle doit trouver de l’aide en créant des liens. Les relations entre les gens (la parenté) sont interdépendantes –nous devons honorer les attentes des autres ; et ceux-ci nous doivent leur soutien en retour.

Cette compréhension confucéenne de l’égo diffère grandement de la conception occidentale. En Occident, un individu est indépendant et cette indépendance signifie qu’il prend la responsabilité de ses actes, contient ses attentes par rapport aux autres et contrôle son comportement. Mais dans le concept confucéen un individu doit compter sur les autres. Ainsi, le développement personnel concerne les autres et on ne doit pas ignorer les attentes des autres. On doit s’adapter aux autres et porter notre responsabilité. Une telle conscience de la responsabilité n’existe pas dans le concept européen d’ego.

Comme le résume l’intellectuel américain A. J. Massella : « L’ego américain est nourri d’individualisme, ce qui a tendance à protéger les individus. Au lieu de s’adapter aux autres, on encourage les gens à rechercher une profonde indépendance et autonomie… Le concept traditionnel chinois de l’ego s’intéresse davantage aux autres, plutôt qu’aux individus… Quoi qu’il en soit, que ce soit l’ego occidental protégeant les individus ou celui de l’Est s’adaptant aux autres, les deux concepts permettent de maintenir un certain ordre, mais il n’est pas nécessaire de considérer l’un d’eux supérieur ».

Extrait de The Way We Think: Chinese View of Life Philosophy, publié chez Sinolingua Press